Zagoria, “L’autre versant de la Grèce” by Le Point magazine

Zagoria, "L'autre versant de la Grèce" by Le Point magazine

Zagoria, “L’autre versant de la Grèce” by Le Point magazine

Pépite. Au-delà des montagnes, dans le nord-ouest du pays, non loin de l’Albanie, gorges vertigineuses et eaux cristallines.

“Au-delà des montagnes”, le nom slave des Zagoria, sonne comme une promesse de beauté. Le sacré n’est jamais loin dans ces paysages vierges où des monastères orthodoxes s’accrochent aux roches, cachés dans des forêts foisonnantes. Il n’est pas rare d’y entendre les hurlements d’un loup ou de tomber sur les traces d’un ours brun. Dans le massif du Pinde, non loin de l’Albanie, des rivières aux eaux cristallines serpentent dans des gorges vertigineuses.

Tableau unique
Cette région, Vasilis Iosifidis la connaît bien. Plus jeune, cet ingénieur de 62 ans aux cheveux poivre et sel venait en escalader les reliefs avec ses amis. Amoureux des paysages, Vasilis a mûri un rêve : partager ce tableau unique avec d’autres amateurs de grands espaces. L’architecte Thomas Tsatsopoulos, son compagnon de cordée, lui dessine ce rêve, et l’hôtel Aristi Mountain Resort ouvre ses portes en 2006. Ses maisonnettes en pierre locale se fondent dans le village d’Aristi, déclinant une décoration rustique et confortable dans les 24 chambres. Ajoutons une piscine intérieure, un spa, un restaurant, des espaces communs et un potager. Malgré la crise grecque, l’établissement reste à flot et rejoint fin 2015 le club très fermé du National Geographic Unique Lodges of the World. L’accueil chaleureux et naturel de son équipe y est sans doute pour beaucoup.

Le temps s’écoule paisiblement, qu’on le passe à nager face au mont Astraka ou à préparer un spetsofai (plat à base de saucisse) avec le chef dans la cuisine en plein air. La journée est rythmée par une descente sur la place du village où le platane centenaire écoute les commérages de la terrasse du café. Les anciens lui préfèrent le bistrot de la douce Alexandra, au visage ridé comme le Pinde. Elle reçoit du facteur le courrier du village entier, appelant les destinataires des missives, pendant que les retraités tapent le carton. Elle sert un thé des montagnes serré – un des remèdes des docteurs de Vikos, réputés pendant des siècles pour leurs connaissances des herbes cueillies dans les gorges voisines.

 En bas, coule la rivière Voïdomatis, qui offre une descente facile en rafting avec baignade pour les moins frileux (l'eau oscille entre 6 et 8 °C toute l'année).Rester encore ou partir ? La curiosité l’emporte. Le temps d’une visite privilégiée, l’hôtel détient la lourde clé du monastère de Panagia Spileotissa (XVIe). Au bout d’une montée raide, la porte grince, s’ouvrant sur un couloir étroit puis une chapelle de toute beauté. Les peintures murales ont gardé leurs couleurs vives ; les chauves-souris veillent sur les lieux. Nous grimpons jusqu’à la lourde cloche et découvrons un panorama grandiose. En bas, coule la rivière Voïdomatis, qui offre une descente facile en rafting avec baignade pour les moins frileux (l’eau oscille entre 6 et 8 °C toute l’année).

Vasilis, avec une vingtaine de personnes, vient de lancer le réseau ZEN (Zagori Excellence Network) afin de promouvoir les Zagoria tout en préservant leur environnement. Une façon d’enrayer l’exode rural. Sur les 46 villages, plusieurs ne comptent qu’une dizaine d’habitants à l’année, comme Dilofo. Ses maisons en pierre grise et à toit de lauze lui confèrent un charme hors du temps. Pas un bruit ne s’élève des ruelles pavées. Tout semble désert. Soudain, une porte s’ouvre à notre passage. Une vieille dame apparaît sur le seuil. Elle raconte le village d’hier, plein de vie. Il y a plus longtemps encore, Dilofo était riche. À l’époque de la Grèce ottomane (XVe-XIXe siècle), la région des Zagoria bénéficiait d’une certaine autonomie. Faisant fortune en Russie, en Serbie ou même à Alexandrie, ses habitants construisaient alors des ponts, des églises et des écoles dans leur village. À Monodendri, le petit musée de la Fondation Rizarios retrace cette époque faste à travers une belle collection de photographies. Reste à voir le village animé de Papigo, point de départ d’une randonnée de cinq heures pour rejoindre le lac du Dragon, au bleu intense. Si loin qu’il semble vraiment « au-delà des montagnes ».

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